Les Gabonais sont-ils encore propriétaires de leur pays ? Si oui, jusqu’à quel degré ? Comment alors expliquer les discriminations et les rejets dont souffrent certains compatriotes vis-à-vis des étrangers ? À qui imputer la responsabilité ? Comment changer cette donne ? Dans cet article, nous exhumons le cas du jeune commerçant du PK12 privé d’espace commercial par un chinois au profit des vendeurs étrangers, pour analyser les causes.
« Gabon d’abord », le concept si cher à feu Léon Mba, président de la République du Gabon et père de l’indépendance du pays, s’est au fil des années fait brader pour devenir « Gabon après ». De là où il, si Léon Mba observe ce qu’est devenu le Gabon, un pays où la corruption a pris le dessus sur le nationalisme, où les valeurs traditionnelles ont été reléguées au second plan, où les étrangers sont devenus mettre du pays et où les gabonais vivent comme s’ils étaient étrangers sur le sol, il va de soi que le père de l’indépendance du pays n’est pas fier de Nous.
Contrairement à d’autres pays en Afrique, il est plus facile pour un étranger d’acquérir une portion de terre au Gabon qu’ailleurs. En Afrique, le pays figure en million d’hectares, parmi les dix premiers pays à vendre ou à faire louer ses terres. Ce phénomène qui s’est développé dès le début des années 2000 a connu une fulgurante percée dix ans après, c’est-à-dire en 2010, du fait de la mise en chantier du pays et du fait des besoins des autorités d’enclencher le processus de « l’Émergence » tel que promu par l’ancien président de la République, Ali Bongo Ondimba. Cette logique a amené de nombreux gabonais à brader leur terre avec les conséquences que cela peut avoir. Un fait accélérer par la corruption, la pauvreté et par la pression des certaines influences haut-placées au sommet de l’Etat.
Cette logique s’est répandue jusque dans les marchés dans lesquels les espaces marchands ont été verrouillés aux nationaux. La preuve avec le marché Mont-Bouët qui selon les estimations serait occupé à près de 80% par les non-nationaux. Cette réalité est aussi celle du paysage commercial des grandes villes, à l’exemple de celle de Libreville où les étrangers prédominent l’environnement commercial. Chinois, libanais, mauritaniens, béninois, camerounais, maliens, sénégalais, togolais, guinéens et autres font la loi de l’offre et de la demande. Au Gabon, ces communautés font la pluie et le beau temps au détriment des nationaux qui, durant des années, ont été oubliés des autorités. La preuve avec le tenancier d’un espace commercial au PK12 qui récemment a pris à un gabonais, le droit de vendre sur un trottoir, car il l’aurait acheté auprès d’un maire de la ville de Ntoum. Une histoire incroyable, mais vraie ! Ce fait transfigure de nombreuses réalités qui sous-tendent les conflits fonciers existant au Gabon entre des ressortissants étrangers et des nationaux.
Si le nouveau président de la Transition, Chef de l’Etat, le Général de brigade Brice Clotaire Oligui Nguema a émis sa volonté de redonner aux gabonais sa dignité, en sonnant la fin de certains droits aux ressortissants étrangers, cette volonté doit s’accompagner d’action concrète sur le terrain avec des sanctions et des rappels à l’ordre. Sans cette fermeté, les mêmes causes qui ont prévalu du temps de l’ancien régime vont perdurer et proliférer au regret des gabonais.
Warren Okolo