Le président du parti politique de l’opposition Les Démocrates, Guy Nzouba Ndama a été interpellé le 17 septembre en provenance du Congo en possession de plus d’un milliard de francs CFA en espèces planqué à l’arrière de son pick-up. Est-ce une infraction pénale ? Quelle est l’origine et l’usage prévu de ces fonds ? À-t-il compromis ses chances de peser sur le scrutin présidentiel à venir ? L’affaire Nzouba Ndama cristallise l’opinion.
L’interpellation de l’opposant gabonais Guy Nzouba Ndama, au village Kabala (frontière Congo-Gabon) en provenance du pays de Dénis Sassou Nguesso, le samedi 17 septembre, en possession d’un peu plus d’un milliards de francs CFA en espèce, a suscité de nombreuses réactions au sein de l’opinion publique.
S’il paraît difficile de faire le tri du déluge des commentaires ayant inondé qui la toile à la suite de cette découverte, certains érudits du droits soutiennent en effet qu’une loi de la CEMAC stipule que : «les voyageurs résident et non-résidents se rendant d’un pays membre de la CEMAC à l’autre peuvent emporter avec eux un montant illimité de billet et de pièces de la CEMAC».
Seul bémol, l’ancien président de l’Assemblée nationale n’aurait pas déclaré sa cagnotte aux services de douanes. Et n’aurait pas pu justifier l’origine et l’usage de ses fonds au terme d’un interrogatoire mené par les agents de la Direction générale de recherche de Franceville, à en croire le substitut du procureur de la localité, faisant le point sur l’affaire ce 18 septembre.
C’est, apprend-on, cette entorse à la loi qui aurait conduit les autorités judiciaires à saisir, puis confier la bagatelle somme de 1 milliard 190 millions de francs CFA de possession de l’ancien baron du parti au pouvoir au Trésor public. Question ! L’État a-t-il le droit de saisir la totalité des fonds d’un citoyen au motif qu’il n’aurait pas déclaré son dû aux services de douanes ? Pour ce délit, Guy Nzouba va-t-il être présenté devant un juge d’instruction ? Quel sera alors l’usage de ces fonds confiés au Trésor Public ? Tant d’interrogations qui méritent autant de réponses.
Dans le landerneau politique, les réactions fusent. Le Directoire de Les Démocrates parle de « mise en scène humiliante», et appelle les militants au calme. Le temps de préparer une sortie musclée pour tenter de laver l’honneur de son président. On retiendra également la sortie du fantasque opposant Bruno Ben Moubamba. Ce dernier estime qu’il y a peu de choses à reprocher au vieil homme de 76 ans. « Le vieux a-t-il dévalisé la Banque centrale ? Je ne crois pas ! Le vieux a-t-il braqué quelqu’un ? C’est impossible ! Le vieux a-t-il été victime d’un complot intérieur ? C’est évident ! Un des vieux dictateurs a-t-il décaissé des fonds pour la future campagne de Nzouba Ndama ? Rien n’est moins certain ! », s’est-il interrogé. Avant de poursuivre : « l’illégalité de ces fonds politiques devra être prouvée. »
Dans les rangs du parti au pouvoir, rares sont les langues qui se délient, si ce n’est celle de Stéphane Germain Iloko Boussengui, ancien porte-parole du Parti démocratique gabonais (PDG). « Évitons les délits de faciès ou de patronyme. Profiter d’une question purement privée pour en faire un problème d’État n’est plus ni moins qu’une opération visant à détourner les Gabonais des vraies questions (La vie chère, la rentrée scolaire, le chômage, la route, la santé, la retraite …) auxquelles ils n’ont pas de réponses appropriées.» a-t-il pesté.
Quant à la société civile dont Geoffroy Foumboula Libeka est l’un des porte-paroles, l’acte de l’ancien patron de l’hémicycle du palais Léon Mba est un scandale. « Se balader avec autant d’argent en espèce est simplement scandaleux, surtout quand on a présidé la maison du peuple pendant des décennies », a-t-il confié. Dans la même veine, Georges Mpaga, Président du réseau des organisations libres pour la bonne gouvernance (ROLBG) estime pour sa part que « Le président Nzouba a fait preuve d’une grande imprudence qui lui est politiquement préjudiciable à 10 mois de la prochaine présidentielle », a-t-il conclu.
Toutefois, reste à savoir quelle tournure prendra cette affaire dans les jours qui viennent. La justice étant déterminée à faire la lumière sur l’origine et l’usage prévu de ces fonds convoyés par ce potentiel candidat à la future élection présidentielle.
Toussaint Mebale