S’opposer en Afrique, quoi de plus normal quand on sait le fossé qui sépare souvent les propos des dirigeants de leurs actes. Les opposants sont présentés comme ceux qui rêvent d’alternance pour faire bouger les choses dans le sens d’améliorer la gouvernance, ce qui, selon eux, profiterait aux populations. Mais, est- ce cela que l’on observe lorsqu’il leur arrive d’accéder au pouvoir ?
De nombreux Africains jugeant les oppositions les classent différemment : il y a pour eux une opposition politique qui s’oppose comme on a coutume de dire et est porteuse d’un véritable projet de société qu’elle compte mettre en œuvre une fois arrivée à la tête de l’Etat, il y a l’opposition dite alimentaire qui, elle, est proche du pouvoir auquel elle fait la cour pour obtenir de lui qu’il lui accorde certaines faveurs et lui permette de vivre décemment. C’est celle- là qui a souvent accès aux médias publics venant se servir de ces canaux pour légitimer l’action du gouvernement même lorsque son discours ambiguë est ponctué de pics contre la gouvernance, une attitude à laquelle on est désormais habitué et qui ne surprend plus personne ou pas grand monde. Pendant ce temps, les populations qui assistent à un ballet parfois insipide, continuent d’attendre que les promesses se réalisent et qu’elles aient ce qu’elles méritent si l’on tient compte du fait qu’elles n’ont pas que des devoirs, mais qu’elles ont aussi des droits dont ceux qui ont un caractère inaliénable. On attend de l’opposition qu’elle soit d’abord organisée avant que d’ensuite donner des garanties fortes pour que l’on croit en elle, lui accorde du crédit et lui obéisse objectivement. La particularité de nos oppositions est qu’elles sont souvent constituées de personnalités issues des anciens partis uniques qui ont acquis certaines habitudes dont elles ont du mal à se défaire. Elles tiennent de ce fait à sauvegarder leur statut et ne sont pas pour la plupart favorables à des changements qui les défavoriseraient. C’est donc dire qu’elles ne travaillent pas dans le sens de la satisfaction des désirs des populations, mais pour plutôt asseoir leur notoriété et continuer d’avoir une place de choix au soleil. Depuis l’avènement du multipartisme en 1990, la création de formations par ces mêmes personnalités ressemble à un jeu consistant à s’entourer non seulement des membres de la famille, d’amis et connaissances que l’on corrompt en l’absence d’idéologie si ce n’est celle qui s’appuie sur des arguments bien connus de tous, reposant sur la ferme volonté du dirigeant de « vouloir succéder au président de la République ».
Pesanteurs et/ou influences ?
Quid, est- on alors en droit de se demander, du projet de société, des propositions qui devraient être faites aux populations pour les convaincre d’adhérer à ses vues ? Celles- ci sont-elles différentes de celles des autres au sens où elles ont quelque chose de particulier qui puisse nous amener croire qu’avec l’opposition, des améliorations notables peuvent être apportées à la gouvernance ? Sait- on que les anciennes puissances coloniales qui n’ont pas cessé de s’ingérer dans les affaires intérieures de nos pays se tiennent toujours à la porte de ceux- ci aux aguets comme si elles se doutaient de quelque chose ? Elles doivent d’ailleurs s’assurer tout le temps que les liens « d’amitié et de coopération » conclus depuis les indépendances restent intacts et que leur renforcement est assuré par le maintien au pouvoir de quelqu’un avec qui elles entretiennent d’excellents rapports. Dans ce contexte, à quoi sert donc l’opposition, s’il en est une qui soit véritable, quand on sait que la tendance est à la préservation par les pays du nord de leurs intérêts en Afrique ? Le général de Gaulle n’avait- il pas été on ne peut plus clair lorsqu’il avait avancé « la France n’a pas d’amis, elle n’a que des intérêts » ? Poser la question de la logique de l’opposition une fois au pouvoir renvoie inéluctablement à se demander si celle- ci a les moyens de se défaire de la tutelle de l’ancien colonisateur sans payer le prix fort. Certes, elle arrive très certainement portée par les populations, mais cela suffit- il à avoir la garantie selon laquelle la gestion du pays ne dépendra que de ses propres idéaux ? Combien d’opposants n’a-t-on pas vu accéder au pouvoir depuis l’instauration de la Démocratie et du Multipartisme en Afrique sans que l’on n’ait rien vu changer de fondamental ? A quoi cela est- il dû se demande- t- on à juste titre car il est naturel que l’on cherche à comprendre ce qui se passe sous nos yeux et qui nous concerne au premier- chef. Les réponses sont parfois évasives lorsque l’on tente d’apporter quelques explications, mais dans la plupart des cas, c’est motus, bouche cousue au nom du secret d’Etat.
La Rédaction.